35 ans à Vivre dans la peau d'un autre que soi

J’ai passé pas moins de la première partie de ma vie à porter les costumes trop grand ou trop petit qui m’avaient été prêtés par la société.

Aujourd’hui, je peux témoigner de combien c’est douloureux de chercher malgré soi à vivre dans la peau de tout le monde avec le sentiment de n’être personne.

Mais pendant tout ce temps, il aurait été encore plus douloureux de reconnaitre que je jouais à être ce que les autres attendaient de moi pour avoir une place dans leur théâtre.

J’avais bien trop peur d’être congédié mais à ne pas en douter, je savais que je n’étais pas à ma place.

Pendant des années, chaque soir, j’ai laissé tomber le voile du déni sur le théâtre dans lequel je me suis fourvoyé, forçant mon jeu d’acteur afin d’être un autre que moi-même mais surtout afin d’être apprécié et valorisé, aimer quoi !

Et à vrai dire, je ne m’en veux car à bien y penser, il est des moments où j’ai pris du plaisir à jouer et puis, c’est tellement bon d’être reconnu, d’être applaudi et aimer et peu importe le costume, n’est-ce pas.

Et néanmoins, c’est bon jusqu’au jour où le costume devient vraiment trop étroit. Ce jour ou l’on se perd sur la scène pour ensuite aller se cacher en coulisse, tellement on a le sentiment de ne plus ressembler à rien dans cette peau qui nous a été greffé.

Aujourd’hui, je peux témoigner de combien cela peut-être souffrant de ne pas savoir que l’on souffre de ne pas être soi-même.

Car c’est ici la racine de la souffrance, bien plus que de ne pas s’autoriser à être ce que l’on ressent, c’est vivre dans le déni ou l’inconscience de ce fait qui est le plus douloureux !

Le plus ironique dans tous cela, c’est que plus nous souffrons, plus nous craignons d’être esseulé et plus nous avons tendance à rempiler pour une autre tournée sur ces planches qui nous ont pourtant déjà vu tellement souffrir, de ne pas être nous-même.

Lorsque cela vous arrive, nous finissons par ne plus avoir d’éclat et même si nous faisons preuve de la meilleure volonté du monde, nous avons bon jouer et surjouer, quel que soit le domaine de notre vie, le public semble nous avoir abandonner.

Quoi de plus normal car à force de nous conformer à des scénarios qui ont été écrit pour tout le monde et donc, pour personne, nous nous sommes dilués jusqu’à ne plus être visible.

Le vide qui se crée alors autour de nous est proportionnelle au vide qui se crée en nous. C’est parce que nous prenons cela pour une forme de vide existentielle que nous cherchons à le remplir par tous les moyens possibles. Je vous laisse à votre expérience ou votre imagination sur ce point.

Aujourd’hui je peux témoigner de cela parce très tôt, à l’aube de cette première partie de vie, j’ai ressenti ce besoin de compenser cette marche à contre sens de moi-même.

Mon mal-être est alors devenu proportionnel à la distance que j’ai mise entre moi et cette image que je cherchais à renvoyer de cet autre moi. C’est par cette faille que la dépendance s’est immiscé dans ma vie.

Dès lors, je suis passé d’un costume à l’autre en éclusant tous les fût d’alcool qui roulaient sur ma route et ce, afin de supporter cet inconfort que je ne pouvais pas nommer ni comprendre.

Ecluser jusqu’à me noyer et me retrouver tout nu. Nu, sans costume, sans rôle et sans plus aucun théâtre pour aller jouer et me sentir exister.

J’ai longtemps pensé que l’alcool m’avait tout pris avant de comprendre qu’il avait fait de la place dans ma garde-robe.

J’ai longtemps galéré, vraiment galéré et même au point de prendre l’habitude d’enfiler cet autre costume, celui d’une victime.

Et puis, à force de persévérance et parce que j’ai toujours eu foi en moi, j’ai fini par comprendre que ce vide que j’ai cherchez à remplir afin de rester à la superficie de cette drôlesse de vie ou j’avais le sentiment d’exister, j’ai fini par prendre conscience qu’il étant en fait un espace sans limite dans lequel j’étais invité à me rencontrer.

Je me rappelle encore bien, il y a quelques années seulement, comme il n’y avait plus rien d’autre dans ma vie que cet espace, j’ai choisi de l’utiliser pour vraiment aller rencontrer celui que j’ai toujours été, en coulisse.

Aujourd’hui je peux en témoigner. La vie sait où elle nous emmène mais il nous faut reconnaitre le mensonge de la vérité. Il nous faut faire la différence entre ce qui fonctionne pour nous et ce que nous faisons parce que cela fonctionne pour les autres.

Je ne me serai jamais découvert cette passion d’accompagner et de guider les personnes qui sont en quêtes d’elles même si je ne m’étais pas égaré autant de fois sur la route et je dis bien égaré.

Nous ne sommes jamais perdus, jamais !

Aujourd’hui, je peux vraiment témoigner de cela, quel que soit votre situation et votre position dans la vie, ne perdez jamais de vue que c’est lorsque vous êtes confronté à ce qui ressemble à un vide existentiel que vous êtes invité à faire la véritable expérience de vous-même.

Gardez la foi en ce que vous voulez, mais gardez la foi. Et puis, jouez et prenez soin de vous amuser car la joie est le meilleur indicateur pour vous rapprocher de vous-même

 
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